Le cas Richard Jewell

Ah Clint Eastwood…ce génie border sénile, qui n’a pas vraiment ébloui depuis Gran Torino (2009) et surtout dont les réalisations dérivent gentiment vers ses opinions personnelles à savoir patriotisme à outrance, peur des immigrés et amour des armes.

American Sniper était trop patriotique, J. Edgar trop pompeux, et Le 15h17 pour Paris et La Mule étaient carrément mauvais. Seul Jersey Boys dénote un peu tant c’était original au milieu de tout ça, et assez rafraichissant.

Donc forcément, un nouveau film inspiré par un fait divers assez peu connu en Europe (à tel point que le titre original composé uniquement du nom du protagoniste n’a pas suffi en français…) ne me donnait que très peu envie. Mais c’était cela ou une comédie romantico-machiste avec Franck Dubosc alors bon.

 

Et bien sans surprise, c’est très très dispensable. Déjà les 2h10 passaient laaaaargement en 1h45, mais alors laaaaargement.

Ensuite les personnages sont tous beaucoup trop « gros » et pénibles (même celui de Cathy Bates !), notamment celui d’Olivia Wilde à savoir la journaliste fouille-merde très très méchante mais qui réalise à la fin qu’elle s’en veut. Seul le rôle de l’avocat, interprété par ce génie de Sam Rockwell (coeur coeur), sort un peu du lot et offre même quelques sourires.

Paul Walter Hauser, l’inconnu au bataillon qui campe le personnage principal en raison de sa ressemblance physique avec « le vrai », joue plutôt bien (dans la mesure permise par le rôle) et a le mérite de donner un premier rôle en surpoids (chose rare dans un pays comptant pourtant 93 millions d’obèses).

 

En somme une énième preuve que les bons faits divers ne font pas les bons films (coucou Traque à Boston !), que le père Eastwood ferait mieux de passer sa retraite à chasser avec ses copains de la NRA, et qu’il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent au cinéma en ce moment !

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La Mule

Défenseur malgré moi d’American Sniper en dépit d’un patriotisme à la limite du supportable, je ne peux en revanche pas cautionner Sully ni encore moins l’infâme Le 15H17 pour ParisClint était pour moi un vieillard irrécupérable.

Et puis le voilà qui resurgit devant et derrière la caméra, dans une énième histoire vraie. Je ne pars pas convaincu.

 

Les faits ont beau être vrais, il a bien fallu romancer : Clint s’est allègrement éloigné de la réalité, et de la plus mauvaise des manières. Tout paraît complètement fake : le héros va aux fiançailles de sa fille et s’embrouille avec sa famille ? Le seul mexicain présent lui propose de transporter de la drogue. Whaaaaaat ? Il fait trois voyages avec de la drogue, et il se fait inviter au Mexique par le parrain du cartel pour fumer des cigares et niquer des putes. Whaaaattt ? Et je vous en passe des meilleures.

Le fameux cartel est cliché au possible ; c’est bien simple on dirait un mauvais clip de rap américain. En parlant de clichés, le casting a été réalisé par une machine reliée à IMDB, je ne vois pas d’autre explication. Parrain du cartel ? Andy Garcia. Flic hispanique ? Michael Peña. Patron de la DEA ? Laurence Fishburne. Trafiquant rebelle ? Clifton Collins Jr. Hallucinant.

 

Visuellement aussi le cliché est permanent : tout premier plan en macro sur des fleurs au soleil, on se croirait dans Forrest Gump ; dialogues filmés en mode telenovelas, notamment le cartel ; et surtout, surtout, les transitions Windows Movie Maker les plus dégueulasses de l’histoire du Cinéma quasiment entre chaque scène.

 

En bref on en vient à se demander si le réalisateur de 88 ans (!) n’était pas trop fatigué après le tournage pour suivre un montage qui aurait pu (et encore) sauver un scénario faiblard. Le film de trop (encore) ?

Pour finir sur une note positive, il faut noter que l’humour est bien plus présent que par le passé, et que la vieillesse semble apporter à Clint une certaine autodérision…


La Promesse de l’aube

Avant-première : Pierre Niney et Charlotte Gainsbourg sont là, l’envie monte. Conditions optimales.

Premières images : Romain Gary est à l’article de la mort, sa femme découvre et commence à lire les épreuves de ce qui sera La promesse de l’aube. Vu, vu et revu ; j’angoisse un peu. Puis Charlotte arrive en mère juive qui en fait des caisses : j’angoisse encore plus.

 

Quand soudain…la mayonnaise prend, et de quelle manière : qu’il est rare de découvrir une vraie épopée « bigger than life », un film d’aventure français bouleversant et drôle.

Si ce film présente bien quelques lieux communs de réalisation (on pense notamment à l’épisode de la vieille dame dans le désert, auquel mon cœur d’artichaut a cependant immédiatement adhéré), c’est avant tout la vie incroyable du « vrai » Romain Gary. En 66 trop courtes années, ce génie a tour à tour été : enfant pauvre dans le froid de Vilnius, résistant et aviateur, double récipiendaire du Goncourt, mari de Jean Seberg…le genre d’homme qui a tout de même provoqué en duel Clint Eastwood.

Un homme et une vie comme il semble que le monde n’en fait plus.

 

Ce film, comme le roman éponyme, est une ode à la maternité inconditionnelle et à la dette éternelle des enfants envers leur génitrice. Mais c’est également, et ce fut là ma plus grande surprise, un film extrêmement ambitieux et dont la production value n’a rien à envier aux américains. La vingtaine de millions d’euros est en effet bien présente à l’écran, notamment lors d’une excellente scène de combat aérien.

Côté casting : Pierre Niney assure avec brio ce beau pari, et clairement il fallait les épaules ; Charlotte Gainsbourg flirte (volontairement) en permanence entre le too much et une justesse folle dans ce rôle de mère qui sacrifie tout pour permettre l’ascension de son fils ; enfin le petit Pawel Puchalski, notamment grâce à un regard assez flippant, campe à merveille Gary enfant.

 

Quelle belle aventure, quel beau pari relevé, et quel bel hommage au roman. Le cinéma français peut être fier de réalisations comme celle-ci, et Eric Barbier (Le Serpent, Le dernier diamant) ne joue clairement plus dans la même cour.

A voir !


American Sniper

Réalité, Kingsman, Bob l’éponge le film, et ce nouveau Clint Eastwood: grosse journée pour les cinéphiles. Je dois avouer que j’attendais le dernier plus impatiemment que les autres, à la fois en tant que passionné de la chose militaire qu’en tant que lecteur du livre à l’origine de ce film. Et je l’avais adoré.

Le mythe des Navy SEAL n’en finit pas de faire rêver: le stage BUD/S, le fameux trident, la crème de la crème des armées américaines. La preuve en est que le dernier film de guerre moderne en date (Du sang et des larmes) était aussi inspirée d’un SEAL, Marcus Luttrell (qui d’ailleurs parle dans ses deux livres de Chris Kyle, héros d’American Sniper, qu’il a croisé sur le terrain). On peut aussi citer GI Jane (A armes égales), film très sous-estimé de Ridley Scott.

J’ai adoré ce film avant même qu’il ne commence, grâce à ses bandes-annonces: très peu nombreuses, et ne dévoilant que les premiers instants du film. On approuve.

Petite listes de défaut, histoire de s’en débarrasser: certaines scènes où on voit « la grosse ficelle », Clint avec ses gros sabots patriotiques si je puis dire; des détails douteux comme les coups de fil personnels sur le terrain et via un téléphone GPS sécurisé (bien que les SEALs disposent d’une certaine liberté, comme en attestent leur barbe autorisée ou les logo du comic Punisher sur leur véhicules); enfin, le faux bébé le moins bien fait de l’Histoire. Voilà.

 

Pour tout le reste, rien à dire: bonne alternance de scènes de tension et de retours à la maison (comme dans le livre), scènes d’action à couper le souffle… La scène finale, particulièrement bien écrite et intense dans le livre, est parfaitement retranscrite à l’écran. Quant à Bradley…il est P A R F A I T. Qui a dit Oscar ?!

 

J’ai passé un excellent moment. Et vous vous doutez bien de ce que je pense des critiques contre l’ultra-patriotisme à l’américaine, ou la glorification du sniper soldat « lâche ». Chris Kyle est un héros. Si notre pays pouvait retrouver ne serait-ce qu’un dixième du patriotisme américain…

J’ai deux envies après ce film: relire le livre, et retourner à l’armée (j’ai eu la chance d’effectuer un « mini-service militaire dans un des plus fiers régiments de notre pays) !

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Jersey Boys

Je ne suis pas un grand fan des comédies musicales: m’attendant à un Glee version années 50, j’allais voir ce dernier Clint Eastwood à reculons et ce malgré le succès du musical originel.

Mais, idiot que je suis, je n’avais pas bien fait mes devoirs ! J’aurais dû savoir que ce film est en fait le biopic d’un groupe de légende…Frankie Valli and the Four Seasons ! Mais si: Big girls don’t cry (pour les fans de Dirty Dancing notamment !), Walk like a man, What a night (CloClo puis Yannick ne s’y sont pas trompés…), Can’t take my eyes off of you, Beggin… La belle époque.

Et ce film, pourtant d’un genre inexploré par le maître Eastwood (Dave Brubeck: In His Own Sweet Way étant un documentaire), est un sacrément bon biopic ! Il en a le schéma habituel: les débuts difficiles (ici en tant qu’apprentis gangsters de la mafia de New Jersey), les premiers succès, la gloire, puis la chute, et enfin le come-back. Toujours le même schéma, car les vies d’artistes sont comme ça en vrai finalement…

Les personnages principaux sont tout simplement incroyables, notamment deux d’entre eux: John Lloyd Young, interprétant Frankie, réussit idéalement la transition au grand écran (il était déjà dans le musical, pour lequel il a remporté tous les prix de la planète) en étant impeccable dan son jeu et en chantant avec cette voix nasillarde si particulière qu’était celle de Valli (la ressemblance est bluffante !); le deuxième n’est pas une surprise puisque c’est Vincent Piazza, habitué des rôles de petits mafieux (Les Sopranos, Boardwalk Empire), qui interprète à merveille le vilain petit canard du groupe.

Ajoutez à cela Christopher Walken en parrain de la mafia (il se fait vieux…), une apparition du futur Joe Pesci, des scènes de narration face caméra (House of Cards est passé par là, je vous le dis !), des blagues anachroniques (notamment sur Liberace, hilarante), et des chansons entraînantes qui ne prendront jamais une ride….vous obtenez un très bon film, ovni dans la filmographie du réalisateur Eastwood qui prouve ainsi qu’il sait définitivement tout faire.

PS: ne ratez pas le générique de fin !

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