Drunk

Ayant déjà goûté le duo Mads Mikkelsen et son réalisateur Thomas Vinterberg dans le sublime La Chasse, je ne pouvais qu’être surexcité par ce nouveau film racontant l’expérience menée par un groupe d’amis et consistant à maintenir en permanence un certain niveau d’alcoolémie.

C’était en tout cas ainsi que le présentait la presse et la bande-annonce. J’attendais donc sagement une comédie arty de bonne facture, au vu des sacrés CV des deux monsieurs susmentionnés. Mais c’est en vérité tellement plus…

On découvre tout d’abord la bande de potes, indéniablement un côté Le coeur des hommes (quatre potes quarantenaires, et profs !) qui n’est pas sans me plaire, avec néanmoins un focus sur le personnage de Mads. De loin le plus torturé, on sent vite que cette « expérience » aura plus de conséquences et d’enseignements pour lui.

Avec toute la finesse du jeu de cet immense acteur (on peut lire une scène entière sur son visage), Vinterberg livre comme à son habitude une subtile oscillation entre psychologie humaine et émotion visuelle. Mention spéciale également à la magnifique (et bien nomméee) Maria Bonnevie.

Ce sens du drame, dans son acceptation littérale, est bien plus fort que dans La Chasse où le caractère « exceptionnel » des évènements rendait plus difficile l’identification. Ici c’est toute la tragédie du Monsieur tout le monde, la déchéance du quotidien, qui semble-t-il n’ont jamais été aussi bien retranscrites.

Quel génie que de prendre pour prétexte, si ce n’est pour alibi, l’expérience d’un sombre psychologue norvégien pour au final explorer non seulement notre rapport sociétal à l’alcool mais nos cellules familiales au sens large !

Ce thème de l’alcool décomplexé, solution (de prime abord) à tous les problèmes, est il faut le dire particulièrement rafraichissant en cette époque de « A consommer avec modération », « 3 fruits et légumes par jour » et autres couvre-feux…

Que dire de la fin, à interpréter à l’aune de votre état d’esprit du moment : poésie visuelle, chargée de sens et de goût de la vie. A ce stade du film, vous ne faites déjà plus qu’un avec le personnage principal.

Comme s’il avait anticipé mes désirs, le réalisateur danois livre un Coeur des hommes mais au niveau de Sorrentino et sa Grande Belleza. Rien que ça.

Voilà un film comme je les aime, dont on sort comme après un long rêve ; comme après avoir vécu une vie.

Affiches, posters et images de Drunk (2020) - SensCritique