The Square [Palme d’Or 2017]

Avec les Winter Sleep, Dheepan et autres Michael Haneke, je dois avouer que je ne comptais plus vraiment sur les palmes d’or pour m’emballer. Et puis, et puis…il y a eu cette bande-annonce, et même plus tôt cette affiche. Certains la diront putassière, extraite d’une seule scène non représentative d’un film de 2h20 (en suédois). Je la trouve personnellement à l’image de ce film : à l’exact milieu entre accessibilité et exigence. Vive la palme d’or !

 

C’est le genre de film qui vous donne l’impression d’être une personne brillante parce que vous avez su y déceler les différents sous-textes, et l’intention du réalisateur. La tâche m’a été rendue plus facile par…la présence dudit réalisateur, qui a bien scolairement expliqué son projet. L’oeuvre d’art moderne, qui a eu son petit succès, est devenue un film. Avouez que le risque de navet pompeux était maximal.

Et pourtant non. Ce carré est, à l’image d’un passage piéton, un espace de protection de l’individu et d’égalité des êtres ; idée aussi forte que naïve, de son propre aveu. Puis la réflexion s’élargit : question des gated communities que le réalisateur a vu arriver dans son pays (la Suède), rapports entre enfants et adultes au niveau sociétal (jadis protection désintéressée, aujourd’hui méfiance), rapports aux mendiants que nous croisons chaque jour, etc…

Mais cette pépite est avant tout une excellente satire de l’art contemporain, ce qui n’est pas dénué d’ironie quand on sait ce qu’est devenu le Festival de Cannes !

 

Au-delà du concept, excellent, la réalisation est irréprochable : la caméra est incroyablement fluide, les effets ne cherchent que l’efficacité ; la photographie est magnifique, sublimant les espaces froids de la capitale suédoise et notamment de son palais royal.

Côté casting : l’acteur principal danois Claes Bang est une vraie découverte, sorte de cousin nordique du Jep de la Grande BellezaElizabeth Moss est d’une fraîcheur inouïe dans un rôle assez inattendu quand Dominic West est uniquement de passage. Grosse claque, Terry Notary est la meilleure imitation de singe de l’Histoire dans la scène de la bande-annonce : déjà culte.

Enfin la musique, entre le puissant Genesis de Justice et une ré-interprétation entêtante de Bach, est largement à la hauteur.

 

En somme une palme d’or bien méritée, ce qui est déjà un miracle en soi.

A voir de toute urgence !