Annette

99% du temps je sais si je désire voir un film ou pas. Ici j’étais véritablement partagé. Voyez plutôt.

+ : Holy Motors est une des plus grandes claques cinématographiques de ma vie ; Carax a toujours eu un sens inné de l’alliage image/musique, donc l’exercice de la comédie musicale ne peut qu’être intéressant ; j’ai toujours eu hâte de voir comment se déroule gentiment la carrière ciné de Simon Helberg ; enfin il se trouve que par un hasard fou j’ai été quelques semaines en tournage en face du Théâtre Royal Flamand de Bruxelles, où se tournait concomitamment une partie de ce film…

– : Je n’ai jamais pu tenir plus de 10 minutes devant Les Amants du Pont-Neuf ; j’ai beaucoup de mal à supporter Marion Cotillard, affection connue sous la dénomination courante de « Syndrome The Dark Knight Rises » ; Adam Driver peut m’émouvoir comme jamais dans Marriage Story ou m’horripiler de prétention Brooklynesque dans Paterson ; je ne connais pas le travail du groupe Sparks, aux manettes de la musique comme du scénario.

Sur ces infinies considérations, j’y suis allé.


Je ne saurais mieux décrire mon ressenti qu’en paraphrasant un contributeur bien inspiré du site Allociné : ce film est un savant mélange, malheureusement sous-dosé, de scènes de fulgurance artistique et de moments d’extrême gêne.

C’était en effet assez prévisible lorsque les dialogues sont à 95% chantés, par des comédiens qui ne sont pas…chanteurs justement. Si mon petit chouchou Simon Helberg ne s’en tire pas trop mal (il porte notamment ma séquence préférée du film, lorsqu’il dirige l’orchestre), le duo Driver/Cotillard vous fera bien saigner des oreilles et les chansons sont dans l’ensemble assez nases.

Côté moments de génie : on retiendra la scène d’introduction, celle de l’accouchement (une des rares chansons qui tienne la route) ainsi que la scène finale où Driver récupère auprès de moi tout son crédit.


Dans la grande tradition des films si « différents », quelques moments de grâce vous feront oublier les 120 autres minutes où vous et vos voisins vous êtes clairement demandé ce que vous foutiez là.

Si la poésie naïve de Carax vire souvent (malgré lui ?) au burlesque, elle ne laisse en tout cas jamais indifférent.

Annette - film 2021 - AlloCiné

Hardcore Henry

Ce film réussit, par sa simple existence, le miracle d’être à la fois le premier film moderne entièrement en vue subjective (moderne seulement, car d’autres y avaient pensé avant même l’invention des jeux-vidéos FPS; voir cet excellent article) et un des rares long-métrages directement inspiré de ce qui n’était qu’une petite vidéo Youtube (ici)…avant de devenir « virale ».

Un film entièrement à la première personne, filmée uniquement à la GoPro: ça sentait fortement la gerbe assurée. Et en effet les premières minutes sont un peu longues (le film, dans son ensemble, gagnerait à perdre dix bonnes minutes), le spectateur confus n’y remarquant que la faiblesse du jeu des acteurs et les limites budgétaires dans les effets visuels.

Puis le film avance gentiment et, au fur et à mesure que les bonnes idées (de réalisation et de scénario) s’accumulent, le concept prend tout son sens: en devenant un film d’action intéressant en soi, le concept de la subjectivité devient naturel et même appréciable ! Une scène d’escalade d’un bâtiment produit une véritable sensation de vertige, une simple scène de discussion en voiture apparaît comme entièrement neuve aux yeux du cinéphile le plus averti, etc…

Les cascades sont encore plus impressionnantes à hauteur d’œil humain, toutes les scènes ou presque sont des plans-séquences: un nouveau genre est né ! Croyez-moi, il y en aura d’autres.

S’ajoutent à cela de bonnes surprises: la brève apparition d’un acteur très connu, du gore dès le générique mais du gore très fun (la scène finale étant juste grandiose), et surtout de bonnes grosses doses d’humour bien senties.

 

J’étais loin d’imaginer cela en allant au cinéma grâce à une vidéo Youtube, mais ce film a de fortes chances de devenir culte une fois sorti en DVD !

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